« En ce temps-là,
voyant les foules,
Jésus gravit la montagne.
Il s’assit, et ses disciples s’approchèrent de lui.
Alors, ouvrant la bouche, il les enseignait.
Il disait …»

Le début de cet évangile nous fait suivre ou imaginer les gestes de Jésus, et aussi ceux de ses disciples. Voir, gravir, s’assoir, ouvrir la bouche, enseigner…

Saint Mathieu précise tout ce qui précèdera les paroles de Jésus. Lire cette introduction du texte de Mathieu nous prépare à écouter Jésus comme la foule en ce temps. Nous nous sentons disposés un peu comme si nous vivions la scène. Nous sommes mêmes les auditeurs actuels du Christ. Et nous sommes suspendus à ses lèvres, le fixant du regard, sans le quitter, attendant avec impatience ce qu’il nous dira.

Alors, ouvrant la bouche, il les enseignait. Que disait-il ? Heureux, heureux, heureux, réjouissez-vous… Une petite remarque est que ces attitudes de bonheur attribuées aux personnes selon les conditions citées par Jésus ne sont pas inscrites dans le futur. C’est un impératif présent, si non le présent de l’indicatif. Car, on pourrait dire, « vous êtes » ou « soyez heureux ». Mais quel est ce bonheur qui prétend exister juste à côté de son antonyme le malheur ?

Être doux, miséricordieux, artisan de paix parait nous donner quelque chance aussi petite soit elle pour être heureux. En revanche, avoir faim de la justice, pleurer, être persécuté, être victime d’abus sous toutes ses formes, victime de la méchanceté, de la guerre… Comment puis-je entendre les mots du Christ m’invitant à la joie ?  Où et quand trouver le bonheur dans ces situations parfois tragiques ?

A mon avis, le bonheur dont il s’agit est une espérance de joie. L’espérance élève, l’espérance est profonde, l’espérance nous délie de nos situations et nous met debout. L’espérance rassure. Elle est stable à la différence de l’espoir qui est temporaire. Parce que je suis dans l’espérance, victime ou pas, je combattrai pour la justice, je lutterai pour la non persécution, je m’engagerai pour la pureté des cœurs ; j’avancerai afin qu’il y ait plus de joie partagée que de tristesses communiquées. L’espérance nous met du côté du Christ.

La récompense est grande dans les cieux. Il n’est pas dit ici qu’elle sera grande. Elle est là et nous attend. Ma récompense est au bout de mes combats. Toi ma sœur, toi mon frère, Jésus te dit : sois heureux quel que soit ce que tu vis. Si tu es persécuté, essuies tes larmes et lève-toi, bats-toi pour que la persécution ne prenne pas de l’ampleur. Si tu es victime d’injustice, lève-toi et lutte pour que cette injustice régresse autour de toi. Notre bonheur se trouve dans notre attitude de combat.

Nous verrons cette récompense quand des personnes jadis enchainées se sentiront libérées à jamais parce que nous avons combattu pour eux, nous serons dans l’allégresse lorsque le voisin jadis ennemi de son voisin choisira de lui sourire au nom de la réconciliation. Car notre bonheur découle de la justice, la miséricorde et la paix. Et c’est pour cela que nous pouvons être heureux dès maintenant suite à la parole du Christ. Chaque combat me met sur le chemin de mon bonheur et celui de l’autre. Et s’il y a plus de joie à donner qu’à recevoir, la récompense est vraiment grande dans les cieux. Elle est là où règne la joie. Là où l’homme est heureux, se lit le concret du texte des « béatitudes ».  Dieu se nomme Amour et il n’abandonne pas ceux qui se battent pour l’amour. Ce sont eux les pauvres de cœur. C’est par sa grâce que nous pouvons réaliser notre bonheur, celui d’ici-bas et le bonheur de l’éternité.

Sr Virginie DOLEBZANGA

Sr Virginie Dolebzanga