Création d’Eve, cathédrale de Montreale, Palerme, Sicile

A nouveau nous voilà reconduit dans ces merveilleux textes des origines qu’il nous faut lire et relire, avec diverses traductions pour bien en saisir toutes les harmoniques.

Le Seigneur Dieu dit :
« Il n’est pas bon que l’homme
(adam) soit seul.
Je vais lui faire une aide qui lui correspondra. »

Alors le Seigneur modèle les bêtes et les oiseaux, mais Adam, le terreux, reste seul. Il donne un nom aux animaux, mais ne trouve pas d’alter ego parmi eux.

Alors le Seigneur Dieu fit tomber sur lui un sommeil mystérieux,
et l’homme
(adam) s’endormit.

Alors le Seigneur, à partir du côté d’Adam, le terreux, façonne une femme (isha) et l’amène à l’homme (adam). C’est alors seulement que l’homme s’écrit :

« Cette fois-ci, voilà l’os de mes os
et la chair de ma chair !
On l’appellera femme – Ishsha –,
elle qui fut tirée de l’homme – Ish. »

L’avènement de l’incomplétude de l’homme et de la femme leur permet de s’adresser l’un à l’autre. L’incomplétude leur permet de se parler, et d’exister pour un autre que soi. L’avènement de la femme – ishsha permet de nommer l’homme, ish. Adam, nom générique de l’humanité – le terreux – n’existe réellement que d’être incomplet, en manque d’un autre avec qui parler. Alors, ish et ishsha, l’homme et la femme de la Genèse, en chair et en os, se mettent à parler puis à se parler.

Il est sans doute préférable de traduire « côté » et non « côte » : la femme est l’autre côté de l’homme, un point de vue qu’il n’a pas, lorsqu’elle n’a pas le sien. Constamment en manque l’un de l’autre, en manque d’autrui, ils vont apprendre à se parler. Parfois, et même assez souvent, cela marchera et ce sera merveille.

D’autres fois, la parole échouera sur l’incompréhension de l’un par l’autre et parfois la violence. Il peut hélas devenir alors urgent de sauver sa peau. Et nul ne peut jeter la pierre à ceux dont l’échec bouleverse l’existence. Les Pharisiens de l’évangile ont beau jeu de tendre un piège à Jésus mais il l’évite soigneusement. Le Christ ne propose pas une morale au rabais, mais il en change la tonalité : l’amour entre deux êtres est l’image la plus criante de l’amour de Dieu pour l’humanité. Il ne s’agit donc pas d’abord de proposer de petits arrangements à ceux qui n’y arrivent pas, mais de magnifier celles et ceux qui donnent à voir la bonté de Dieu dans la vie qu’ils s’offrent mutuellement.

Mais voilà, l’échec peut arriver comme dans toutes nos relations. Les hommes et les femmes dont la vie conjugale a viré au cauchemar savent un peu de quelle dure épreuve il s’agit.

Les Pharisiens ne savent pas que Jésus va justement choisir de vivre à sa façon l’échec et rejoindre tous ceux qui peinent, en acceptant de mourir du côté de celles et ceux que la bonne conscience réprouve, crucifié parmi les bandits. Et s’il nous arrive d’être du côté des procureurs, nous pourrions relire avec profit l’épitre aux Hébreux quelques versets plus loin dans ce chapitre 2 dont un trop court extrait est proposé :

« Et parce qu’il a souffert jusqu’au bout l’épreuve,
il est capable de venir en aide à ceux qui sont éprouvés. » (Hébreux 2, 18)

La finale de la version longue de l’évangile de ce jour nous replace alors au bon endroit : loin de la polémique voulue par les Pharisiens, il accueille les enfants qu’on lui présente. Ce sont les plus petits, les plus vulnérables, qui toujours sont au cœur de son attention.

Cette vulnérabilité foncière est celle que le récit de la Genèse exposait : nous sommes incomplets, en manque d’un autre, jamais « entiers », et notre plus grande force tient dans la confiance que nous pouvons mettre dans l’autre, cette confiance qui nous vient de l’enfance, un trésor à protéger coûte que coûte.

Anne Lécu op

Anne Lécu op

 

 

 

 

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De nuevo nos encontramos ante estos maravillosos textos de los orígenes, que es necesario leer y releer, con diversas traducciones para captar todas sus armonías.

El Señor Dios dijo:
«No es bueno que el hombre (adam) esté solo.
Voy a hacerle una ayuda que le corresponda.»

Entonces el Señor modela las bestias y las aves, pero Adán, el terrestre, sigue solo. Da nombre a los animales, pero no encuentra un alter ego entre ellos.

Entonces el Señor Dios hizo caer sobre él un sueño misterioso,
y el hombre (adam) se durmió.

 Luego, el Señor, a partir del costado de Adán, el terrestre, modela a una mujer (isha) y la lleva ante el hombre (adam). Sólo entonces el hombre exclamó:

«Esta vez sí, es hueso de mis huesos
y carne de mi carne.
Se la llamará mujer – Ishsha –,
pues ha sido tomada del hombre – Ish.»

El advenimiento de la incompletitud del hombre y de la mujer les permite dirigirse el uno al otro. La incompletitud les permite hablarse y existir para alguien más que para sí mismos. El advenimiento de la mujer – ishsha – permite nombrar al hombre, ish. Adán, nombre genérico de la humanidad – el terrestre – solo existe realmente al ser incompleto, en falta de otro con quien hablar. Entonces, ish e ishsha, el hombre y la mujer del Génesis, en carne y hueso, comienzan a hablar y luego a hablarse mutuamente.

Es preferible traducir «costado» en lugar de «costilla»: la mujer es el otro lado del hombre, un punto de vista que él no tiene, como ella no tiene el suyo. Constantemente en falta uno del otro, en falta de los demás, aprenderán a hablarse. A veces, y con frecuencia, eso funcionará y será maravilloso. Otras veces, la palabra fallará en la incomprensión del uno hacia el otro y, a veces, en la violencia. Entonces, lamentablemente, puede ser urgente salvarse a sí mismo. Y nadie puede condenar a quienes el fracaso les ha trastocado la vida. Los fariseos del evangelio intentan poner una trampa a Jesús, pero él la evita cuidadosamente. Cristo no propone una moral de baja calidad, pero sí cambia su tonalidad: el amor entre dos seres es la imagen más contundente del amor de Dios hacia la humanidad. No se trata, por tanto, de ofrecer pequeños arreglos a quienes no lo logran, sino de magnificar a aquellos que reflejan la bondad de Dios en la vida que se ofrecen mutuamente.

Pero el fracaso puede llegar, como sucede en todas nuestras relaciones. Los hombres y mujeres cuya vida conyugal se ha convertido en una pesadilla saben bien lo dura que puede ser esta prueba.

Los fariseos no saben que Jesús precisamente eligió vivir el fracaso a su manera, uniéndose a todos aquellos que sufren, aceptando morir del lado de los que la buena conciencia reprueba, crucificado entre ladrones. Y si nos encontramos del lado de los jueces, podríamos releer con provecho la epístola a los Hebreos, algunos versículos más adelante en este capítulo 2, del cual se propone un extracto demasiado breve:

«Y porque él mismo sufrió hasta el final la prueba,
es capaz de socorrer a los que están siendo probados.» (Hebreos 2, 18)

La parte final de la versión larga del evangelio de hoy nos devuelve al lugar correcto: lejos de la polémica que buscan los fariseos, Jesús acoge a los niños que le presentan. Son los más pequeños, los más vulnerables, quienes siempre están en el centro de su atención.

Esa vulnerabilidad esencial es la que expone el relato del Génesis: somos incompletos, estamos en falta de otro, nunca «enteros», y nuestra mayor fortaleza reside en la confianza que podemos depositar en el otro, una confianza que nos viene de la infancia, un tesoro que debemos proteger a toda costa.

Anne Lécu op