En contemplant le mystère pascal un contraste nous saisit. En effet, l’expérience humaine nous apprend que tout finit au tombeau. L’histoire du Christ au contraire, comme nous pouvons le voir ce dimanche de Pâques, nous enseigne que tout commence au tombeau : la résurrection du Christ. Cette réalité au cœur de la foi chrétienne nourrit et entretient l’espérance dans la mesure où elle motive la quête de Dieu. Loin de maintenir dans l’immobilisme, la découverte du tombeau vide, met en mouvement. Il s’agit là, de la clé de voûte des textes de ce jour.

En effet, la communauté des disciples ne s’est pas recréée autour d’un tombeau mais autour de Jésus ressuscité. Pâques, c’est donc la fête de la grande révélation, c’est la fête de la joie, c’est surtout la fête de l’espérance d’un ailleurs où le Christ nous attend. C’est ce à quoi Saint Paul nous invite dans la deuxième lecture : « Frères, si vous êtes ressuscités avec le Christ, recherchez les réalités d’en haut : c’est là qu’est le Christ, assis à la droite de Dieu ». Cette résurrection déjà en germe dans notre baptême, sera effective à travers le dynamisme de la foi qui nous fait comprendre que le Christ est toujours là, mais au-delà. En d’autres termes, le Christ ressuscité ne devient pas absent du monde mais nous invite à Le rechercher à travers des réalités qui transcendent le monde. Pour Le contempler aujourd’hui dans sa gloire, nos yeux de chair ne suffiront pas.

En réalité, la résurrection de Jésus transfigure nos vies marquées par la torpeur et nous fait opérer le passage vers un monde moins charnel et plus spirituel. La première lecture nous relate à merveille ce que Pierre est devenu après cette expérience. Car du « peureux d’hier » qu’il était, il est devenu le courageux et le galant qui prend la parole pour proclamer devant le Centurion de l’armée romaine, ce Jésus qu’il a renié naguère. C’est l’expression éloquente d’une métamorphose spirituelle. Mais au fond, c’est la foi qui anime et galvanise le passage d’un état à un autre comme en témoigne la finale de la première lecture : « Quiconque croit en lui reçoit par son nom le pardon de ses péchés ». Et la foi ne nous installe pas, elle nous met en route. Route qui mène non plus vers des réalités palpables mais vers des réalités qui nous éblouissent.

De ce point de vue, c’est d’abord l’attitude de Marie Madeleine dans l’évangile qui émerveille. Premier témoin de la résurrection du Christ, elle se présente comme une femme fidèle et itinérante. Déjà présente au pied de la Croix, son attachement au Christ la porte au sépulcre et du sépulcre vers les apôtres Pierre et Jean. C’est elle qui inaugure l’aurore d’une foi en chemin, c’est elle qui incarne le témoin qui annonce la bonne nouvelle, confirmant ainsi l’oracle du prophète Isaïe. C’est ensuite l’empressement de Pierre et Jean qui impressionne. Ils sont tous deux disciples et apôtres. Apôtres parce qu’envoyés. Disciples parce que fidèles et dociles, et par conséquent, des gens qui méritent confiance. Cette précision est nécessaire pour comprendre leur geste. En effet, dans leur course vers le tombeau, Jean « courut plus vite que Pierre et arriva au tombeau ». Cependant, c’est Pierre le dernier à venir au tombeau qui, le premier, « entre dans le tombeau ». Ce détail que souligne l’évangéliste montre bien ce qui caractérise chacun d’eux. De fait, s’ils sont tous deux apôtres et disciples, Pierre se révèle plus apôtre que disciple et Jean se révèle plus disciple qu’apôtre. C’est dire que l’apôtre, l’envoyé, devait être le premier à voir pour l’annoncer alors que le disciple devait être le premier à manifester la confiance : « Il vit, et il crut ». En réalité foi et confiance ont même racine.

Un déplacement s’est véritablement opéré dans la démarche de Pierre et de Jean puisque c’est seulement après avoir vu qu’ils ont compris que le Christ devait ressusciter. Suivre Jésus, c’est donc vivre cette métanoia qui est une conversion du cœur, qui nous fait changer de direction pour nous tourner vers Dieu et Le reconnaître comme tel. L’événement pascal nous engage ainsi dans la mesure où il bouscule nos certitudes et déplace nos sécurités. Il s’agit aujourd’hui d’accepter de faire l’expérience de la surprise, de l’imprévisibilité de Dieu qui nous arrache à nos rigidités et à nos calculs humains.

Comme Marie Madeleine, soyons des témoins pour annoncer au monde la joie des joies : Christ est ressuscité ! Il est vraiment ressuscité ! Comme Pierre et Jean soyons des apôtres et des disciples pour proclamer l’espérance et à en vivre.

Sr Pascaline Bilgo