Saint Jean l’évangéliste nous fait visualiser un texte encadré de regards. Le premier est celui de Jean-Baptiste sur Jésus, et le second, celui de Jésus sur Pierre. Les deux regards nous enseignent ils quelque chose ? Nous y reviendrons.

Je me laisse rejoindre par cette scène qui se déroule comme dans l’ordinaire. Des rencontres qui vont déclencher des dialogues de fond. Et l’un des dialogues permettra aux disciples de Jean-Baptiste d’aller au-delà de la connaissance physique de Jésus : « Que cherchez-vous ? Rabbi, où demeures-tu ? » Ce bref échange m’a toujours bouleversée depuis les premiers jours où je l’ai entendu jusqu’à maintenant. En effet, la réponse sort un peu de l’ordinaire. Nous avons l’habitude d’indiquer nos maisons par des moyens d’adresses postales, d’indications gestuelles.  Parfois nous réduisons même nos domiciles à nos activités. En voulant expliquer là où nous résidons, nous finissons par plutôt présenter les divers postes que nous occupons afin de mieux situer notre interlocuteur. Si les personnes ne sont pas totalement rassurées, il arrive que nous les motivions à une recherche sur internet si toutefois nous avons une certaine célébrité ou notoriété suivant nos occupations.

Par ailleurs, je remarque que la question des disciples tout comme la réponse de Jésus expriment une soif. Leur soif se traduit par un désir de se rapprocher. Soif de tisser des liens. Dans tous les cas, il y a déjà une certaine confiance qui s’installe dans les cœurs. La réaction de Jésus va permettre la croissance de cette confiance. Peut-être qu’une fois dans notre vie, nous avons également osé inviter l’autre à connaitre chez nous ou se faire inviter pour découvrir chez l’autre. Avons-nous eu l’occasion de comparer ces deux opportunités de la découverte ?

J’aimerais m’attarder à ces deux moyens ou mouvements de la rencontre de l’autre. Jésus invite les disciples à faire déjà un déplacement. « Venez et voyez ». Je trouve que cet impératif est à la fois bienveillant. Il est sous-entendu, « N’aies pas peur, déplace-toi, tu verras de tes propres yeux, je t’accueille, tu es le bienvenu chez moi, tu feras ta propre expérience ». Le déplacement dans ce cadre qui peut être physique ou intérieur authentifie le désir de connaitre l’autre. Il permet certainement une expérience personnelle de cette découverte et sans doute peut solidifier la confiance en l’autre. C’est aussi en se rendant chez l’autre que nous pouvons mieux faire connaissance et éventuellement faire des projets communs avec lui. Mon déplacement me vaut le cadeau d’une vraie rencontre car la réponse de Jésus peut être comprise même au-delà de la vue et de la découverte physique.  Jésus exhorte les disciples à une rencontre profonde comme cela peut se sentir dans d’autres contextes : En Jean 15, 5 ; il déclare : « Celui qui demeure en moi et en qui je demeure portera beaucoup de fruits… ». Ce genre de rencontre que suggère Jésus est celle qui donne le temps d’observer, de contempler, voire d’imiter la personne dans ses actes si cela est inspirant. Les sujets de l’expérience personnelle de la foi et l’appropriation de la foi trouvent bien leur place dans ce passage biblique.

Pour revenir au sujet des regards évoqué plus haut, je pense que Jean le Baptiste se fait l’intermédiaire de ses disciples et par conséquent il est le nôtre dans notre relation avec le Christ. Il pose son regard sur l’Homme-Dieu, nous le montre, puis a l’air de s’éclipser. « Voici l’Agneau de Dieu ». C’est un regard de confiance, qui redit combien il reste confiant en cédant la place à Jésus. Et il cède vraiment la place car désormais ses disciples s’intéresseront à ce Jésus. Le regard de Jésus, peut être le même regard de confiance, Jésus le renvoie sur Pierre, comme pour céder déjà lui aussi la place à Pierre. Voici deux confiances sinon trois, qui se croisent en une rencontre, et nous rappellent comment la vie chrétienne ou la suite du Christ, individuelle ou collective, se communique par des intermédiaires, grandit par le biais de chaque membre et surtout s’enrichit grâce à des personnes qui pensent à faire de la place aux autres au nom des confiances mutuelles.

Jean montre Jésus à ses disciples et semble se retirer, se fait petit, mais Jésus réintègre l’humain dans son projet en s’intéressant à Pierre. Le fils de l’homme nous apprend que sa collaboration avec l’homme est d’antan et sera éternelle. Il suffit de lui faire confiance et d’aller connaitre chez lui. Néanmoins Jean nous confie un secret, c’est dans l’humilité que nous apprenons à le connaitre.

Sr Virginie Dolebzanga

Sr Virginie Dolebzanga